UN HOMME / UN MÉTIER
Portrait d'une Chef de cave... Corinne Bailleul
pour la Maison Castelnau.
Un coup de foudre pour le champagne
Carine Bailleul oeuvre depuis 18 ans à l'élaboration des cuvées de la Maison Castelnau. Aujourd'hui Chef de cave, elle a bien voulu partager avec nous sa passion de l'univers du vin et plus particulièrement du champagne.
Comment devient-on chef de cave ?
Après un BTS en Industrie Agroalimentaire (IAA), j’ai intégré le Diplôme National d’œnologue (DNO) de Reims. J’ai complété mon cursus par un Master en marketing et vins de Champagne.
Devenir Chef de cave a été un cheminement qui fait partie intégrante des métiers de l’œnologie.
Durant toutes ces années d’apprentissage, j’ai beaucoup écouté, observé, partagé, travaillé aussi et surtout beaucoup reçu. La plupart des acteurs du vin à tout niveau aime donner et transmettre leur savoir-faire.
Alors je dirai que je suis devenue chef de cave car j’ai pris beaucoup de plaisir à recevoir cet amour du travail bien fait.
Pour vous le vin a toujours été une passion ?
On peut plutôt dire un coup de foudre. J’ai découvert cet univers fascinant peuplé de gens passionnés à l’occasion de la première partie de mes études. Je suis entrée dans l’œnologie car j’ai avant tout rencontré des gens passionnants.
Depuis combien de temps occupez-vous ce poste chez Castelnau et quelles ont été les différentes étapes pour y aboutir ?
J’occupe ce poste depuis un peu moins d’un an mais je travaille dans cette maison depuis 18 ans.
Je suis arrivée chez Castelnau en 2003 dans le cadre de mon stage de dernière année de Diplôme National d’œnologue. Je n’ai ensuite plus vraiment quitté cette maison hormis durant l’hiver et le printemps 2005 pour apprendre le métier de vigneron.
Après mon Master j’ai été embauchée définitivement en 2006. Depuis j’ai occupé différents postes qui m’ont permis d’appréhender le métier du vin dans sa globalité. J’ai débuté par la fin du processus vin à savoir le dégorgement. Ensuite au fil des années, j’ai remonté le temps. Je suis passée en cave, au tirage pour terminer par la cuverie. En 2015 j’ai pris la responsabilité de la cuverie et du tirage.
Au fil du temps, j’ai cheminé au travers des différents métiers du vin de la maison. Je me suis imprégnée des savoir-faire de l’équipe Castelnau dans sa globalité et j’ai eu la chance de connaitre deux chefs de caves successifs qui m’ont inculqué rigueur, patience et persévérance.
Aujourd’hui je remplace Elisabeth Sarcelet qui va très bientôt faire valoir ses droits à la retraite.
Vous avez notamment créé la cuvée Hors catégorie CM 1993. Pouvez-vous nous expliquer le but recherché dans l’élaboration de cette cuvée hors norme ?
Il s’agit du troisième opus de notre tête de cuvée. Nous l’avons créé dans l’esprit de ne rien s’interdire tout en gardant un mode d’élaboration constant et spécifique. La seule exigence étant l’harmonie des vins qui la composent.
Elle est la sœur d’âme des cols de montagne classés Hors Catégorie qui sont le point d’orgue de certaines étapes du plus grand évènement cycliste mondial et dont chaque franchissement est un nouvel exploit. C’est une discrète référence à cette discipline que la Maison Castelnau accompagne avec constance depuis de nombreuses années.
CM signifie donc col de la Madeleine et 1993 correspond à l’altitude de ce col Hors Categorie, gravit en 2013, année de tirage de ce troisième opus.
Elle vient enrichir notre gamme par son originalité mais ne doit pas trahir la signature des Vins Castelnau.
Nous avons fait le choix de travailler des petits volumes afin qu’elle devienne une cuvée rare. En 2013 nous avons en effet tiré 5160 bouteilles et 406 magnums.
Quel est exactement votre rôle ?
Mon rôle est de garantir le style des vins de la maison. Cela passe par un travail d’équipe qui assure la régularité de nos cuvées.
Un chef de cave est à la fois un compositeur et un chef d’orchestre. Chaque année nous faisons jouer une nouvelle partition à nos équipes. A nous de veiller sur les hommes pour mener à bien nos répétitions. A nous de faire en sorte que tous les instruments soient bien accordés pour que nos représentations offrent la symphonie organoleptique que nous avons imaginée pour le dégustateur.
Chaque année le morceau change, mais notre travail est de faire en sorte que l’orchestration reste la même et que l’on reconnaisse l’empreinte du compositeur.
Puis parfois, il faut savoir surprendre au travers d’une improvisation maitrisée
Comment se compose cette cuvée ?
Notre Hors Catégorie CM 1993 est composée de 15 % de Chardonnay, de 55 % de Pinot Noir et de 30 % de Pinot Meunier provenant en majorité de la Grande et de la Petite Montage de Reims. Sa personnalité lui est conférée par ses 75 % de vins de réserve de 2008, 2010 et 2011 que nous avons élevés en fûts entre 10 et 12 mois.
L’esprit Hors Catégorie s’inscrit dans un univers aromatique chaleureux grâce à des notes chocolatées, fumées et grillée. Le monde de la torréfaction apparait ensuite et nous fait voyager entre le cuir et le tabac brun.
Le tout se révèle délicatement en bouche avec des agrumes qui délivrent une belle fraicheur en final.
Quelles sont, selon vous, les qualités d’un bon chef de cave ?
Je pense que la dimension humaine est centrale dans notre rôle et notre fonction. Le travail d’équipe fait partie intégrante de notre quotidien. J’aurais par conséquent tendance à dire qu’il faut avant toute chose aimer les hommes et les femmes qui produisent nos raisins, qui élaborent nos vins, qui réparent nos outils, qui analysent nos cuvées et qui au sens large prennent soin de notre produit.
Il s’agit de s’affirmer tout en restant humble et de faire confiance tout en donnant confiance !
Être Chef de cave dans une Union de producteur nécessite de respecter les valeurs sociales et humaines de la coopérative. Cette structure nous donne un cadre humain avec une approche éthique. L’âme de la CRVC est faite de l’engagement de tous.
Comment s’élabore le choix des différents assemblages qui vont prédestiner à une nouvelle cuvée ?
Chez Castelnau nous avons un panel de dégustation qui est la clé de voute de nos assemblages. Nous travaillons au quotidien ensemble et nous validons les cuvées ensemble.
Il s’agit chaque année de remplir la partition avec des notes de musique qui garantissent le style de notre maison. Je suis présente à chaque étape pour veiller à l’harmonie de toutes les cuvées élaborées.
Quels sont les choix qui ont été faits pour l’élaboration de cette cuvée ?
Nous avons choisi d’engager un travail autour de l’effervescence. Le boisé de cette cuvée est soulignée par la finesse de ses bulles qui lui confère de l’élégance.
De même, l’élevage sous-bois n'est pas une tradition dans la maison. Nous avons étudié cette approche pendant une dizaine d’année avant d’en prendre la décision. Nous travaillons maintenant autour d’un parc de fûts qui présente différentes provenances de bois et de chauffes. Cela nous permet d’avoir une bibliothèque aromatique et organoleptique suffisamment riche pour modeler à notre convenance chaque année nos assemblages.
Quels conseils de choix pourriez-vous donner à nos lecteurs concernant vos différentes cuvées pour Noël ?
Avant tout je pense qu’il faut choisir un champagne que vous souhaitez partager.
Nous élaborons dans la maison des champagnes de gastronomie à long vieillissement sur lies. Cela veut dire que nos cuvées peuvent parfaitement être dégustées durant le repas.
N’hésitez pas à sublimer vos huitres avec le Blanc de Blanc 2007 ou avec l’Origine E.E/9.0 Solera.
Le millésime 2006 accompagnera merveilleusement bien une poularde aux morilles.
Les papilles de vos convives seront enchantées par le mariage d’un plateau de fromage et d’un magnum œnothèque 1998.
Après le repas, le Hors Catégorie CM 1993 prolongera ces beaux moments chaleureux.